Birao, le 6 mai 2008
Après le Tour de France en 2000, le Tour d’Europe en 2004 et 16 pays traversés, la Traversée de l’Australie du sud au nord en 2006, un nouveau rêve, un nouveau défi se réalise :
Quitter Nagasaki est tout de suite une mise en bouche tant les pentes sont raides pour le cycliste voyageur que je suis et les occasions de se perdre multiples.
Grâce à mon expérience, le moral n’a faibli à aucun moment, aussi bien sous la pluie, le froid et le brouillard, que face au vent, au bruit et à l’impossibilité de me faire comprendre malgré la gentillesse constante de ce peuple affable et infatigable.
Ce qui frappe d’abord, c’est l’activité incessante : la circulation automobile intense, les trains nombreux, les enfants allant à l’école à vélo en uniforme (le casque blanc vissé sur la tête), les gens dans les champs, les pêcheurs, les ramasseurs d’algues sur la côte...
Je suis très sensible à l’organisation de l’infrastructure routière : pistes et bandes cyclables (avec leurs pavés glissants) à l’infini, y compris dans les interminables tunnels (j’ai dû enfiler pas moins de
Très vite, le Japon m’apprend la patience. Non seulement les feux tricolores sont innombrables (les ronds-points n’existent pas), mais aussi l’attente est interminable. Après bien des observations, je remarque que les Japonais à vélo ne respectent pas beaucoup les feux rouges. La tentation est grande de les imiter et, très vite, je m’exécute, sachant que le cycliste est prioritaire par rapport à l’automobiliste, de même que le piéton est prioritaire sur le cycliste. Jamais, de ma vie, je n’ai grillé autant de feux rouges ! J’ai hâte de quitter les villes pour découvrir le Japon profond, loin de la jungle de béton et des souterrains de la mégapole s’étirant sur près de mille kilomètres.
Hoteru - "Hôtel" en japonais
Progressivement, je m’imprègne de la culture japonaise, à commencer par la gastronomie souvent raffinée. La cuisine est un aspect important, j’apprécie tous les plats ! Le soir, après une journée souvent éprouvante, c’est avec une joie à peine dissimulée que je me glisse sous la table basse d’un ryokan où je découvre toutes les merveilles : un véritable jeu de piste gustatif parmi les 15 à 20 petits plats proposés par la serveuse aux sourire et gestes délicats. Je prendrai toutefois la plupart de mes repas sur le pouce, tout spécialement le midi, après quelques emplettes dans les konbini (supérettes où l’on trouve de tout et particulièrement des plats individuels à emporter).
Mon côté aventurier m’entraîne pour la nuit dans des endroits "succulents", comme les ryokan pour l’aspect traditionnel, les hôtels de style occidental pour le côté moderne, ou encore un cybercafé inattendu ou un bungalow non chauffé ! Chaque soir, je complète mon carnet de voyage en listant les évènements insignifiants, qui sont pourtant le plus précieux trésor du vagabond temporaire que je suis durant ces quatre semaines. Une fois transmis à mon fils qui réside à Kyoto, ce dernier les met en ligne sur le blog.
J’en profite d’ailleurs pour saluer le travail de qualité qu’il fournit avec assiduité et passion (tiens, tiens…) et je le remercie du fond du cœur pour son aide globale (accueil, nombreux "dépannages linguistiques", assistance au début et à la fin…). Sans lui, je n’aurais, je crois, jamais eu l’audace de traverser ce superbe pays trop mal connu des Occidentaux. J’emporte avec moi de magnifiques souvenirs : des paysages grandioses (lacs, volcans, montagnes, cascades…) habillés de cerisiers en fleurs (sakura) malgré le temps froid et humide, des visites de temples et de pagodes, et surtout les onsen. Un grand merci également à ma belle-fille pour les tracas de réservations et autres, ainsi qu’à ses parents pour leur accueil, leur chaleur et leur disponibilité. Sans oublier, bien évidemment, tous les gens chaleureux qui m’ont accueilli ou guidé spontanément. Une pensée spéciale va naturellement au Père Gourraud qui aura marqué la fin de mon voyage.
Voilà maintenant huit ans que je trouve la paix en parcourant les routes asphaltées du monde. Le vélo est un excellent instrument pour en mesurer l’immensité. Rien ne me met plus en joie, à chaque coup de pédales, que les courbes instables des montagnes ou qu’un horizon fuyant lentement ma tentation de le rejoindre.
Le Bas Pouët, le 24 mai 2008
Plaisirs rassasiés quand Isabelle me fait la surprise de débarquer à Abashiri avec notre fils et sa femme le lendemain de mon arrivée. Vous avez tous été incroyables !
Formidable Japon ! J'y retournerai...